Substitution et personnes âgées
Publié par La Pharmacienne le Mai 01 2009 09:01:11
La substitution générique peut s'avérer plus délicate chez une personne âgée que chez un autre patient. Difficilement quantifiable car, souvent, le refus ne s'exprime pas nettement...

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La substitution générique peut s'avérer plus délicate chez une personne âgée que chez un autre patient. Difficilement quantifiable car, souvent, le refus ne s'exprime pas nettement, le problème peut être résolu grâce à quelques règles simples.

Fréquemment polymédiquées, les personnes âgées sont, de ce fait même, plus susceptibles de refuser «le changement de médicament» que leur propose leur pharmacien. C'est le constat que fait notamment Jean-Luc Bury, P-DG d'Ifmo, pour qui «il est évident que la substitution chez la personne âgée est à la fois plus délicate - imposant d'y aller progressivement - mais aussi plus facile car il existe souvent une relation de confiance de la personne âgée avec son pharmacien.»

Cette constatation faite, est-il possible de la quantifier? L'association Gemme (Générique même médicament) reconnaît ne disposer d'aucune donnée sur cette question. De même, l'enquête menée en 2007 par l'observatoire Ifop-Sandoz n'a pas permis de dégager des données propres aux personnes âgées. La seule notion établie, selon une responsable, est que «dans la population générale, 16% des patients sont réfractaires au générique, une proportion qui s'élève à 28% chez les personnes âgées.»


Dire «médicament générique» plutôt que «générique» rétablit la confiance

Réticence au changement plus qu'au générique


De la même façon, Corinne Dardel (laboratoires Biogaran) indique que «l'étude réalisée par l'observatoire Biogaran avec BVA n'a pas mis en évidence chez les seniors d'éléments spécifiques quant à l'image qu'ils se font du générique ni de problème de compréhension. On ne note pas de critique de l'image ou de l'efficacité du générique: le senior n'a pas une plus mauvaise image du générique que les autres catégories de la population. Le problème provient surtout d'une réticence au changement de ses habitudes...» Mais même dans ce cas, le laboratoire relève que «les seniors appartiennent à un groupe «dépendant» c'est-à-dire qui écoute ce que dit le médecin et ne manifeste pas de refus».

Pour autant, le président du Collectif des Groupements, Pascal Louis, relève, de son côté, qu'au comptoir, «on se trouve de plus en plus fréquemment face à une personne âgée qui refuse autre chose que ce qui est pour elle le»vrai médicament». Une des explications de ce type de comportements pourrait être «la plus grande écoute et la plus grande sensibilité des personnes âgées aux informations: télévision, radio; c'est principalement d'elles que viennent les refus.» Il paraît y avoir une pression médiatique qui, dans des informations orientées et parcellaires sur le générique, sème le doute autour de la non-similitude», rendant plus compliquée la substitution par le pharmacien. Le principe du TFR est un autre obstacle, car «il provoque un effet d'entraînement: si le générique est au prix du princeps, le patient préfère le princeps et, du coup, réclame également le princeps pour le reste de son ordonnance!» Mais, la contrepartie «tiers payant contre générique» s'avère efficace, remarque Pascal Louis, qui ajoute: «C'est dommage mais c'est ainsi!»

Le pharmacien doit jouer son rôle de pédagogue

Beaucoup de formations à la substitution ont été proposées, et il en existe de spécifiquement orientées vers la substitution pour les personnes âgées. Il faut avant tout, estime Christine Caminade, formatrice (Christine Caminade Conseil), «que la personne âgée ait compris le traitement. Il y a une phase d'explication et d'anticipation. Nous abordons ces questions dans notre séminaire sur les besoins spécifiques des plus de 50 ans. La personne qui délivre le générique «doit écrire le nom du princeps sur la boîte. Dans la phase de délivrance et de substitution, elle doit prendre le temps de vérifier que la personne a bien compris: ne pas avaler les deux, ou s'abstenir de prendre le générique faute de l'identifier...» Le pharmacien doit jouer son rôle de pédagogue, d'éducateur de santé. Les supports d'information émanant des laboratoires «sont très utiles, mais parfois écrits en trop petit. L'officine peut construire elle-même une communication, même simple, pour aider à comprendre. Autre petit truc: dire «médicament générique» plutôt que «générique» contribue à établir ou rétablir la confiance».

Jean-Luc Bury indique que «la formation substitution d'Ifmo comporte une partie communication importante, où les différents cas sont envisagés et notamment les seniors! Mais ce qui vaut pour un bon conseil vaut aussi pour la substitution, c'est-à-dire la «règle des 5 C». Celle-ci se détaille de la façon suivante:
1. C comme compétence: assurance, confiance, connaissance des produits.
2. C comme contact: accueil, ambiance générale, climat chaleureux, luminosité, image de l'officine.
3. C comme connaître son client: attentes, symptômes (écoute, dialogue).
4. C comme convaincre: argumentaire, «plus-produits», réponse aux attentes. 5. C comme conclure: posologie, paiement, au revoir.
Moins les points 1, 2 et 3 sont présents... plus le 4 est difficile et le 5 impossible.


Améliorer l'observance

Au comptoir, souligne elle aussi Corinne Dardel, «il s'avère nécessaire d'expliquer. C'est au comptoir qu'il faut accompagner ces patients, les informer, les guider... Coller un morceau de vignette sur l'ordonnance, et recopier sur la boîte le nom du princeps». Parmi les autres actions de Biogaran figure le DVD réalisé avec Fred et Jamy, «Le générique, c'est pas sorcier», que tout patient peut demander, gratuitement, sur le site du laboratoire. Une fois qu'on leur a expliqué le générique, les patients sont rassurés. De toute façon, insiste-t-elle, «il ne faut pas imposer la substitution, sinon cela ne marche pas! Il est important d'expliquer que le pharmacien respecte la prescription, même s'il change la marque.» Le laboratoire diffuse par ailleurs une brochure, mais qui n'est pas spécifique senior... Les outils de communication mis en oeuvre à l'officine «doivent viser à démontrer que le médicament est strictement identique.» Dans le même temps, si aucun kit de formation spécifique n'existe aujourd'hui, le laboratoire «mène une réflexion autour du senior, qui est un patient se soignant beaucoup, donc présentant plus de risques de mauvaise observance.»

L'observance thérapeutique, conclut Christine Caminade, «est le maître mot. Le pharmacien doit être ouvert, à l'écoute de l'objection. Il importe de ne pas passer à côté d'un éventuel effet placebo négatif. Dans sa politique d'achat, le pharmacien, pour ne pas perturber ses patients, doit garder le même générique, donc ne pas sacrifier à toute force aux promotions». Enfin, «pour valider le dispensation, établir un plan de posologie est un service «plus» appréciable »



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