Violences sexuelles : une enfant sur 3 en Afrique australe
Publié par Rosette le Juin 07 2009 20:28:46
Les violences sexuelles perpétrées contre les enfants ont été très longtemps ignorées ou minimisées dans les pays occidentaux. Il en est apparemment de même en Afrique...

Nouvelles étendues

Les violences sexuelles perpétrées contre les enfants ont été très longtemps ignorées ou minimisées dans les pays occidentaux. Il en est apparemment de même en Afrique sub-saharienne aujourd’hui, mais à une toute autre échelle, comme le démontre une étude conduite au Swaziland.

Dans cette région d’Afrique australe, sous l’égide de l’UNICEF et des CDC d’Atlanta, une équipe d’épidémiologiste a tenté d’évaluer la fréquence des antécédents de violences sexuelles chez les jeunes filles.

Pour conduire cette enquête, 1 900 foyers, jugés représentatifs de la population générale du pays, ont été visités et 1 242 jeunes filles ou jeunes femmes de 13 à 24 ans ont accepté de répondre à un questionnaire portant sur les violences sexuelles dont elles auraient pu avoir été victimes avant l’âge de 18 ans. Quatre types principaux de violences sexuelles ont été distinguées : les pénétrations sexuelles avec violence, les rapports sexuels sous la contrainte, les tentatives de viol, les attouchements non consentis.

Des résultats accablants

Un tiers de ces jeunes filles ou jeunes femmes (33,2 %) ont en effet rapporté au moins un épisode de violence sexuelle avant l’âge de 18 ans. Au sens du code pénal français, 13,9 % de ces adolescentes ou jeunes adultes avaient été victimes d’un viol (pénétrations sexuelles avec violence dans 4,9 % des cas ou rapports sexuels sous la contrainte pour 9 % d’entre elles). De plus, 18,8 % avaient été victime d’une tentative de viol et 13,9 % d’attouchements.

Le plus souvent ces violences avaient été perpétrées par un homme connu de la victime (par ordre décroissant de fréquence : voisin, petit ami ou mari, parent [à l’exclusion du père ou du beau-père], ami de la famille, professeur…). Dans près de la moitié des cas, les actes de violence avaient été accomplis au domicile des victimes ou à celui d’amis ou de voisins.

Pour tenter (très imparfaitement) d’évaluer les conséquences de ces violences sur la santé des victimes, Avid Reza et coll. ont recherché des corrélations entre ce type d’antécédents et diverses pathologies, symptômes ou comportements addictifs. Après ajustement pour divers facteurs de confusion, les violences sexuelles étaient associées à une augmentation significative du risque de grossesse non désirée (odd ratio ajusté [OR] : 2,92), de dépression (OR : 2,30), d’alcoolisme (OR : 3,02) et d’infections sexuellement transmissibles (OR : 3,69). Ce dernier point prend toute son importance si l’on se rappelle que le Swaziland est l’un des pays du monde le plus touché par le sida (22,6 % des jeunes femmes de 15 à 24 ans y seraient séropositives pour le HIV).

Une riposte extra-médicale

Malgré la précision apparente de ces résultats (à la décimale près !), ils ne doivent évidemment être considérées que comme des approximations car cette étude conduite sur le terrain peut être entachée de multiples biais. Pour n’en évoquer que quelques uns citons la sous déclaration probable des viols lorsque l’entretien a lieu au domicile, la non dénonciation de parents vivants dans le même foyer (ce qui pourrait expliquer le très petit nombre de pères impliqués), les obstacles linguistiques, la difficulté (si ce n’est l’impossibilité !) des ajustements pratiqués pour contrôler la réalité des associations entre violences sexuelles et pathologies…

Ces écueils méthodologiques ne doivent cependant pas cacher l’essentiel : au moins une jeune femme sur 3 en Afrique australe a été victime de violences sexuelles.

La solution ne relève bien sûr que très peu de la médecine. Mais plutôt de la mise en place de programmes sociaux, éducationnels, culturels, juridiques et policiers au long cours dont les implications sont innombrables. Et qui nécessitent pour être initiés une volonté politique bien souvent absente.

Dr Nicolas Chabert