Somnifères et anxiolytiques augmentent d'1/3 le risque de décès !
Publié par La Pharmacienne le Septembre 28 2010 10:41:37
Les somnifères et anxiolytiques sont par des millions de Français, occasionnellement ou quotidiennement. Or le recours à ces médicaments accroît le risque de mortalité de 36 %, selon une étude canadienne publié dans le Canadian Journal of Psychiatry.

Les résultats de cette étude ont de quoi interpeler ! En France, selon une enquête de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies qui date de 2005, près de quatre adultes interrogés sur dix (37 %) disent avoir déjà pris un médicament psychotrope au cours de leur vie, et un cinquième (19 %) indique l'avoir fait au cours de l'année écoulée. Les femmes sont nettement plus concernées que les hommes : 45 % vs 28 % au cours de la vie, 24 % vs 14 % au cours de l'année. D'une façon générale, les fréquences augmentent avec l'âge jusqu'à 45-54 ans pour plafonner par la suite. Seul le recours aux somnifères augmente au-delà de 55 ans. D'après des travaux de la Haute Autorité de Santé, on estime qu'au-delà de 70 ans, une personne sur deux consomme de façon prolongée des médicaments anxiolytiques ou hypnotiques (benzodiazépines). Les principaux types de médicaments consommés au cours de l'année sont les anxiolytiques (7 %), les somnifères (7 %) et les antidépresseurs (6 %).

Or, dans les travaux dirigés par le Dr Géneviève Belleville, qui a analysé les données de plus de 14 000 Canadiens suivis tous les 2 ans entre 1994 et 2007, la prise de médicaments pour traiter l'insomnie et l'anxiété au cours du mois précédant l'enquête s'accompagnait d'un taux de mortalité de 15,7 %, contre 10,5 % chez ceux qui n'avaient pas eu recours à ces produits psychotropes.

En tenant compte des facteurs de risque individuels susceptibles d'affecter le risque de mortalité de chacun, comme la consommation d'alcool et de tabac, le niveau d'activité physique ainsi que la présence ou l'absence de symptômes dépressifs chez les participants, le Dr Belleville a calculé que la prise de somnifères et d'anxiolytiques est associée à une élévation de 36 % du risque de décès.

En guise d'explications, la psychologue met en avant l'hypothèse selon laquelle ces médicaments affectent le temps de réaction, la vigilance et la coordination, et peuvent entraîner par conséquent des risques de chute et d'accidents. Ils peuvent également avoir un effet inhibiteur sur le système respiratoire et aggraver notamment les problèmes d'apnée du sommeil, suggère-t-elle. Dernier effet avancé par la chercheuse, l'effet inhibiteur de ces produits sur le système nerveux central qui pourrait altérer les capacités de jugement et accroître le risque de suicide.

"Ces médicaments ne sont pas des bonbons, leur consommation est loin d'être inoffensive", met-elle en garde, plaidant pour le développement des thérapies cognitives comportementales qui, selon elle, ont fait leurs preuves dans la prise en charge des troubles du sommeil et dans l'anxiété. Elle préconise donc de combiner l'approche pharmacologique à court terme avec une thérapie psychologique. En France, c'est d'ailleurs l'approche recommandée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Dans ses recommandations destinées aux médecins (les références médicales opposables ou RMO), elle leur demande de ne prescrire un somnifère qu'après échec des méthodes physiologiques ou psychologiques. Amélie Pelletier

Sources
Canadian Journal of Psychiatry, Use of medication for insomnia or anxiety increases mortality risk by 36 percent, Geneviève Belleville (abstract accessible en ligne).
OFDT - Les niveaux d'usage des drogues en France en 2005 - François Beck, Stéphane Legleye, Stanislas Spilka, Xavier Briffault, Arnaud Gautier, Béatrice Lamboy, Christophe Léon, Jean-Louis Wilquin. (étude disponible en ligne).
HAS - Prescription des psychotropes chez le sujet âgé