Hépatite E, une histoire cochonne
Publié par Administrateur le Janvier 01 2009 12:54:30
"L’hépatite E : une hépatite du tiers-Monde présente en Belgique".
Nouvelles étendues

"L’hépatite E : une hépatite du tiers-Monde présente en Belgique". Un titre un brin provocateur pour un article paru en septembre dernier dans la Revue médicale de Liège, où les auteurs remarquent qu’il "est de plus en plus évident qu’une part non négligeable de ces infections est de type autochtone". Au-delà des formules, il est en effet de moins en moins contestable, que l’hépatite E doit être considérée comme une maladie plus autochtone qu’importée.

En Belgique comme ailleurs, y compris en France où, selon une étude très récente menée au CHU Purpan de Toulouse, l’incidence de l’hépatite est stable dans le Sud-Ouest de la France depuis plusieurs années, avec 97 % des cas acquis sur place…

Le virus de l’hépatite E circule donc bien dans les pays développés et il pourrait même être devenu, si l’on en croit une « review » du Lancet, plus fréquent que celui de l’hépatite A : le journal cite par exemple des séroprévalences de 3 % à Tokyo, 3,2 % en France (région Centre), 7,3 % en Catalogne ou 16,6 % en France encore (région du Sud-Ouest). Comment est-ce possible ? Il faut, pour comprendre ce fait épidémiologique surprenant, revenir sur quelques caractéristiques particulières de l’infection à VHE.

La rareté, d’abord, des cas groupés et des épidémies familiales alors que les formes infra cliniques semblent fréquentes. L’âge des malades, ensuite : dans les pays développés, les formes symptomatiques concernent principalement les hommes d’âge mur et les sujets âgés, d’où de fréquentes confusions avec les hépatites médicamenteuses (plus de 20 % des cas répondant aux critères de diagnostic de ces formes toxiques). Le terrain, enfin, les formes fulminantes à pronostic péjoratif –jusqu’à 70 % de mortalité- concernant avant tout les individus présentant une pathologie hépatique chronique pré existante. Quant à l’existence d’infections chroniques, elle est aujourd’hui bien documentée chez certains patients fragiles comme les transplantés recevant un traitement immunosuppressif, mais son impact épidémiologique est sans doute très faible.

Tout bon article concernant le VHE se doit d’énoncer, à un moment ou un autre, que les cochons "devraient être", "might be", pour quelque chose dans la transmission de l’infection à l’homme. Les arguments sont essentiellement ceux d’une grande homologie génétique entre les virus des porcs du cru et ceux mis en évidence chez les infectés (par exemple le génotype 3f dans l’Ouest de la France), et le fait qu’à un instant t donné plus de 20 % de tout élevage de porcs soit sécréteur d’un virus qu’on retrouvera évidemment en quantité dans les eaux usées du voisinage. Si cette hypothèse est la bonne, ce n’est pas demain que les pays développés se débarrasseront du VHE…


Dalton H R et coll. Hepatitis E : an emerging infection in developed countries. Lancet Infectious Diseases, 2008; 11: 698-709
Mansuy J M et coll. : Acute hepatitis E in south-west France over a 5-year period. J Clin Virol Nov, Epub ahead of print.